La viande du pauvre
Jusqu’à la fin du XIXe siècle, le fromage blanc maigre était un produit des campagnes et servait à l’alimentation des travailleurs journaliers. En Alsace et en Lorraine, on l’appelait d’ailleurs « viande du pauvre » grâce à sa richesse en protéines. A Lyon, il était battu, salé, poivré et agrémenté de multiples aromates (échalotes, queues d’oignon, ail, herbes ciselées, vin blanc, vinaigre, huile…). Son aspect rappelait quelque peu celui d’une cervelle et il constituait la nourriture ordinaire des ouvriers des soiries du XIXe siècle, que l’on appelait… « canuts » !
De la cervelle à base de fromage !
Remise au goût du jour pendant l’entre-deux-guerres par le célèbre chef Paul Lacombe, la cervelle de canut reste, aujourd’hui encore, une recette incontournable des « bouchons » lyonnais, ces restaurants typiques, simples et conviviaux qui servent des spécialités locales. On retrouve toutefois cette préparation dans d’autres régions françaises, notamment le Forez, le Velay et l’Ardèche, où l’on utilise alors le caillé initial du fromage local. Elle n’est jamais vendue préparée : c’est une recette exclusivement transformée à la maison ou au restaurant. On sert traditionnellement la cervelle de canut dans une pomme de terre cuite en robe des champs et évidée, ou bien avec du pain de campagne grillé, en entrée ou en fin de repas.
La recette maison
Pour obtenir une délicieuse cervelle de canut, choisissez du fromage blanc en faisselle bien épais et égoutté, de préférence au lait entier. Battez-le avec une spatule pour le lisser (on dit qu’on le « claque », d’où son autre nom de « claqueret » lyonnais), puis ajoutez du sel, du poivre, des fines herbes ciselées au choix (ciboulette, persil, estragon, cerfeuil…) et de l’oignon, de l’échalote ou de l’ail hachés. Pour que le fromage prenne bien le goût des aromates, laissez-le reposer au frais pendant au moins 2 heures (un ou deux jours, c’est encore mieux !). Avant de servir, ajoutez un filet d’huile et éventuellement une lichette de vin blanc sec des coteaux du Lyonnais. Servez comme dans un bouchon ou en guise de trempette pour des légumes croquants : un apéritif léger qui fait l’unanimité !
Crédit photo : Claude Herlédan/CNIEL