Un généreux fromage d’abbaye
Dès le début du XVIe siècle, la commune d’Époisses, en Côte-d’Or, accueillit une communauté de moines cisterciens. S’appuyant sur des pratiques paysannes locales, ceux-ci perfectionnèrent les procédés de fabrication de ce fromage d’exception. Quand, deux siècles plus tard, ils quittèrent le village, ils léguèrent leur savoir-faire aux fermières de la vallée. Dans les petites fermes de l’Auxois, ces dernières améliorèrent et fixèrent la recette, puis firent connaître leur produit. La méthode de fabrication, fondée sur le principe d’une coagulation lente associée aux lavages fréquents du fromage avec du marc de Bourgogne, s’est transmise jusqu’à aujourd’hui dans les fromageries. L’époisses est ainsi la seule AOP à croûte lavée et caillé lactique. Sous une croûte orangée, la pâte, de couleur blanche à beige clair, souple, crémeuse et fondante en bouche, offre des arômes puissants atténués par des notes fruitées et lactiques.
Quel pain pour l’époisses ?
Riche en saveur, l’époisses mérite un pain à sa hauteur. L’accord idéal : une baguette aux graines fabriquée avec du levain (plus le fromage est fort, plus le pain peut contenir de levain, qui lui donne du goût et valorise sa typicité). La croûte et le croquant permettent au fromage de s’étaler à son aise et d’apporter un agréable contraste de textures, tandis que le sésame grillé renforce le côté chaud et épicé des époisses bien affinés. Autre accord plus audacieux : le pain brié normand, sorte de pain brioché à la croûte fine, à la mie dense et au bon goût de beurre. Il convient particulièrement aux époisses dont l’affinage est poussé. Dans ce cas, ils deviennent en effet si crémeux qu’ils fuient leur croûte à la découpe. Il faut alors les enrober de notes douces et beurrées, qui subliment le côté moelleux du fromage tout en atténuant ses notes chaudes. À éviter : les pains aux fruits séchés, trop sucrés, qui par contraste font ressortir l’acidité de l’époisses.
Et en guise de boisson ?
Original et élégant, l’accord avec un champagne demi-sec, par exemple un Drappier Carte d’Or, apporte fraîcheur et minéralité à l’époisses, donnant un délicieux équilibre basé sur l’opposition des saveurs. Quant aux bulles du champagne, elles stimulent le palais puis s’amalgament avec la pâte du fromage. Pour un mariage encore plus insolite, place au thé rouge de Chine, par exemple le Dian Hong du Yunnan. D’une extrême finesse, avec des notes épicées et une pointe d’amertume, celui-ci dompte la fougue et la puissance de l’époisses, composant une dégustation d’une grande douceur. Enfin, l’accord entre bières et croûtes lavées reste incontournable. L’idéal pour l’époisses : une bière de caractère, brune, ambrée ou blonde forte, assez alcoolisée, provenant de préférence du même terroir.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.
Crédit photo : V. RIBAUT / Les Studios Associés / CNIEL.