Aliment universel par excellence, d’une grande richesse nutritionnelle, le lait a fait l’objet, au fil des siècles, de découvertes fondamentales pour améliorer sa conservation, permettre son transport et garantir sa qualité. Deuxième épisode de cette saga historique des produits laitiers : après la Préhistoire et l’Antiquité, le bon en avant de la production fromagère au Moyen Âge (du Ve au XVe siècle).
Le fromage, aliment de base de la population
Si, sur les côtes de la mer du Nord et de la Manche, le lait et le beurre étaient abondamment consommés, c’est le fromage qui dominait partout ailleurs en Europe. Au Moyen Âge, sa production était en grande partie domestique. Elle dépendait donc des conditions locales de fabrication : climat, races d’élevage, nourriture des animaux. C’est pourquoi elle était déjà marquée par une grande diversité. L’objectif était alors de constituer des réserves en vue de la consommation familiale, ce qui poussait à l’ingéniosité. Par exemple, le lavage de la croûte du maroilles permit d’allonger sa durée de conservation.
La mise en commun des ressources des fermes d’un même village ou d’une même montagne donna également naissance aux très grands fromages de longue conservation : deux fois par jour, les fermiers apportaient le lait de la traite dans un lieu de transformation mutualisé. Les premières fruitières apparurent ainsi au XIIIe siècle dans des villages du Jura.
Le rôle des monastères dans le perfectionnement et la diffusion du fromage
De leur côté, les moines jouèrent une place importante dans la diffusion du fromage. Au Moyen Âge, en effet, le modèle alimentaire des abbayes était marqué par le renoncement à la consommation de viande. Elle était remplacée par des mets de substitution comme le poisson, les œufs et les produits laitiers. Les moines redoublèrent d’efforts pour fabriquer de très bons fromages : d’accord pour renoncer au plaisir de la viande, mais pas question pour autant de se priver de tout bonheur gustatif !
Les abbayes devinrent ainsi des centres importants de production et de perfectionnement de plusieurs fromages paysans. Le munster, l’époisses ou l’abondance y forgèrent leur réputation et se diffusèrent hors leur lieu de production, car les monastères jouaient aussi le rôle d’auberges-relais pour les voyageurs qui pouvaient y acheter du fromage. Cerise sur le gâteau : alors que le fromage était considéré comme la « viande des pauvres » et des enfants et délaissé à ce titre par les élites, les communautés monastiques enclenchèrent le processus d’anoblissement qui s’épanouirait pleinement pendant l’époque moderne.
Au prochain épisode, vous découvrirez les progrès de la connaissance du lait et le changement d’image du beurre et du fromage (début du XVIe-fin du XVIIIe siècle).
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