Quand les moines renonçaient à la viande…
Au Moyen Âge, dans le sillage de la règle de Saint-Benoît établie au VIe siècle, le modèle alimentaire monastique était marqué par le renoncement à la consommation de viande. Considérée comme un aliment prestigieux et incomparablement savoureux, coupable de susciter intempérance et avidité, elle était remplacée par plusieurs mets de substitution : poisson, œufs et… produits laitiers. Ceux-ci furent admis par l’Église catholique pendant le carême à partir des XIVe-XVe siècles. Parmi eux, le fromage se taillait la part du lion. Ne qualifiait-on pas cet aliment riche en protéines de « viande des pauvres » ?
… et développaient la culture du fromage…
Les monastères devinrent d’importants centres de production et de perfectionnement des procédés de fabrication de plusieurs fromages paysans. C’est au sein de leurs terres et de leurs caves que se forgea la réputation de produits célèbres tels le munster, l’époisses ou l’abondance. Les moines jouèrent également un grand rôle dans leur diffusion hors du lieu de fabrication : les abbayes, situées sur les routes commerciales et de pèlerinages, faisaient office d’auberges-relais où les voyageurs pouvaient non seulement se sustenter, mais aussi se procurer de beaux morceaux de fromage à emporter dans leurs sacs.
… tout en améliorant son image !
Par ailleurs, les moines améliorèrent l’image du fromage. Depuis l’antiquité, celui-ci était en effet associé au monde paysan et rustique : les pauvres, qui ne pouvaient manger de la viande tous les jours, faisaient face au risque de la faim en misant sur des produits plus accessibles et susceptibles d’être gardés. En adoptant et en promouvant le fromage, les communautés monastiques, souvent liées aux milieux nobiliaires, contribuèrent à le diffuser au sein des élites. La civilisation du fromage était née !
À lire : Entre la poire et le fromage, ou comment un proverbe peut raconter l’histoire, de Massimo Montanari, Agnès Viénot Editions, 2009.
Crédits photos : A.MURIOT / F.ZVARDON / CNIEL