De la tenue… et du goût
Lors de la fabrication du fromage, le caillé est moulé pour prendre sa forme définitive. Il peut être versé dans un cercle de bois, dit éclisse. Par exemple, le caillé du beaufort est rassemblé dans une toile, puis moulé dans un cercle de bois de hêtre convexe, que l’on nomme « cercle de beaufort ». Sa forme bien particulière va donner un talon concave au fromage une fois démoulé, devenant un de ses signes de reconnaissance.
Néanmoins, peu de fromages gardent leur cerclage de bois lors de l’affinage et jusqu’au consommateur. Le plus connu d’entre tous, c’est le vacherin Mont d’Or : son cerclage d’épicéa, un résineux caractéristique du Jura, lui donne un parfum unique de résine et de sous-bois qui le rendent reconnaissable dès la première bouchée.
Fromage à pâte molle, le vacherin est cerclé après démoulage dans une sangle d’épicéa tel que précisément mentionné dans le cahier des charges de l’AOP. Il est ensuite affiné sur des planches d’épicéa pendant 21 jours puis placé à son tour dans une boîte toujours du même bois. La boîte est légèrement trop petite afin que la croûte plisse légèrement pour conserver tout le moelleux et le fondant de la pâte coulante. On dit aussi que c’est pour évoquer les reliefs montagneux du Haut Doubs ! Loin de n’être qu’une décoration ou un simple emballage, cette sangle de bois est partie prenante du fromage, signifiant son attachement au terroir du Haut Doubs.
La preuve ? C’est un artisan dédié, le « sanglier », qui les réalise. Métier attesté dès Louis XIV en Franche-Comté, les bûcherons-sangliers ne sont plus qu’une douzaine à exercer cette profession.
D’autres fromages encerclés
Si vous aimez le moelleux boisé du vacherin Mont d’Or, vous aimerez aussi le vacherin des Bauges, dit aussi vacherin de Savoie, fabriqué à l’automne avec le lait des premières gelées. Il n’est hélas que très peu produit trois fromageries environ, et se déguste surtout dans la région.
De création plus récente -2008-, le moelleux du Revard revisite la tradition du vacherin des Bauges. Il est fabriqué avec du lait de vaches abondance, tarine et montbéliarde, collecté sur la zone AOP de la Tome des bauges. Au lait cru, à la pâte molle et à la croûte lavée, sa ceinture vise surtout à éviter à sa pâte ultra-moelleuse de se répandre… et à le parfumer d’arômes boisés. A guetter aussi dans les crémeries : le sanglé de la fromagerie Badoz.
Du cercle aux bandelettes
Version « allégée » du cercle de bois : les bandelettes naturelles entourant un fromage. L’exemple le plus connu ? Le livarot ! Fabriqué à l’origine au lait écrémé, ce fromage avait peu de tenue et avait tendance à s’affaisser. Pour conserver sa forme ronde, il était entouré de 5 bandelettes faites en laiches, c’est-à-dire en roseaux séchés, dits aussi massettes. C’est elles qui lui ont donné son surnom de colonel : il est décoré de 5 bandes, comme les galons sur la veste du militaire. Désormais plus décoratives qu’utiles, ces bandelettes sont maintenant le plus souvent de papier.
Crédits photo : V. RIBAUT / Les Studios Associés / CNIEL